Joël Sabrié
La pratique de l'hydravion
Première partie : la conception des flotteurs
Introduction
Si vous lisez régulièrement @éronews (Ndrc : j'espère bien !!), vous avez pu découvrir au détours de quelques reportages ma passion pour les hydravions. Cette catégorie d'aéromodélisme, peu répandue, présente pourtant l'avantage de concilier détente familiale au bord de l'eau et pratique de notre passion. Elle permet de renouveler le plaisir de pilotage grave aux évolutions au sein d'un milieu inhabituel.
Je vais vous présenter au travers de cette série d'article les éléments nécessaires pour vous lancer en toute quiétude dans la pratique de l'hydravion. Je ne traiterai ici que des hydravions à flotteur, moyen le plus simple et pratique pour s'essayer à l'hydravion à partir d'un modèle existant, type trainer ou autre.
La taille des flotteurs
La taille des flotteurs est sujet de biens des polémiques sur les terrains. Certains considèrent qu'il faut prendre comme référence le poids de l'appareil (c'est le cas des fabricants mais comme dit un certain BC, quelquefois, on doute qu'ils aient eux même essayé leurs trucs), d'autre pensent qu'il vaut mieux considérer la longueur du fuselage. Le problème, c'est que c'est en fait un mélange des deux et que ce choix va être la base indispensable pour la suite.
Des flotteurs trop gros ne feront qu'augmenter la traînée et le poids embarqué, trop petits et votre appareil va s'enfoncer dans l'eau avec une instabilité dangereuse en roulis et des difficultés pour déjauger. On parle de taille mais il faudrait en fait parler de volume, je rappelle que suivant la poussée d'Archimède, si la partie immergée de ceux ci représente 2 litres, ils reçoivent une poussée verticale de bas en haut de 2 Kilos dans de l'eau (densité égale à 1). Mais pour calculer le volume, pas facile et il n'existe pas de formules miracles.
Les côtes sont donc subjectives mais comme il faut bien commencer quelque part, il va falloir fixer des règles. La longueur du flotteur va définir la stabilité de l'appareil en tangage. Il semble que l'expérience montre que 75% de la longueur du fuselage soit une bonne valeur de départ, disons dans une plage de 70 à 80%. Si vous avez déjà pratiqué l'hydravion et que vous possédez un appareil très léger (type 3D), vous pouvez descendre jusqu'à 60%, mais attention à la stabilité.
Si la longueur est définie, la largeur va influer sur le volume, donc sur le poids admissible par celui-ci. Elle va aussi jouer sur la traînée en vol et l'esthétique. La moyenne se situe aux alentours de 12 à 15% de la longueur du flotteur, cette côte restant modifiable en fonction du poids et du "look" désiré.
Forme latérale (vue de coté)
On peut considérer que les flotteurs sont en deux parties : à l'avant et à l'arrière du redan.
La partie avant est la partie principale du flotteur, elle a en fait la forme d'une coque de bateau de type hors-bord. Avec la vitesse, cette partie va faire sortir de l'eau l'ensemble de l'appareil jusqu'à ce qu'il n'y ait plus que le redan qui touche (regardez donc un bateau en pleine vitesse, il n'y a plus que la partie arrière qui effleure l'eau).
La partie arrière a pour fonction principale de tenir les flotteurs horizontaux lorsqu'ils flottent en déportant vers l'arrière une partie flottante. Elle n'a pas à priori d'autres fonctions utiles car elle n'est plus en contact dès que l'avion accélère, par contre, elle est nécessaire car en raisonnant par l'absurde, si elle n'était pas la, l'appareil basculerait vers l'arrière
.
En revanche, si son utilité est limitée, sa conception est importante car, mal conçue, elle peut empêcher l'appareil de décoller de l'eau. Vous aurez remarqué que cette partie est inclinée, c'est en fait pour pouvoir créer un dégagement lorsque l'arrière de l'avion s'abaisse afin de donner de la portance à l'aile lors de la phase de décollage.
Le redan
La jonction entre ces deux parties se fait au redan, sorte de cassure sous le flotteur. Il est indispensable. Il a pour fonction d'éviter l'effet "ventouse" qui collerait irrémédiablement l'appareil à l'eau avec la vitesse.
Le redan doit toujours être au moins perpendiculaire au fond du flotteur, toujours pour éviter l'effet ventouse. La cassure doit être franche. A ce propos, il en est de même pour l'arrière du flotteur, et pour les même raisons.
Certains, pour améliorer encore les performances du redan placent un tube qui traverse le flotteur de haut en bas juste derrière le redan, ce qui a pour effet de diminuer la dépression derrière celui ci en amenant de l'air. Cela fonctionne bien sur des flotteurs avec des redans trop petits.
Le ski
A l'avant du redan, il y a une petite partie plane. Bien souvent négligée, elle a pourtant son importance, surtout lors du calage sur l'avion. Elle est la partie qui glisse sur l'eau lors de la prise de vitesse. La plupart du temps, on l'aligne par rapport au dessus du flotteur, ce qui est bon dans la plupart des cas, mais ce n'est pas une obligation et cela dépend du calage que l'on va choisir par la suite. Le meilleur exemple est celui du Grumman Goose ou cette partie n'est pas parallèle à la ligne de vol, ses concepteur ayant sûrement considéré qu'il fallait que la portance de l'avion soit augmentée pendant la phase de prise de vitesse.
Cette partie, je la nomme "SKI" car comme le skieur nautique, il faut qu'elle soit bien à plat pour pouvoir accélérer. C'est à cet endroit que se trouvera le centre de gravité de l'ensemble.
Dégagement arrière
Un des points les plus importants est l'angle formé entre la ligne de glissage sur l'eau et le dégagement laissé par la partie arrière du flotteur. Cet angle est celui que va prendre votre appareil pour pouvoir décoller. Trop faible et l'arrière du flotteur touche l'eau lorsque vous tirez la profondeur, ce qui le freine. C'est une des premières causes de dysfonctionnement des hydravions.
Proportions générales recommandées
C'est un dessin de flotteurs que j'utilise régulièrement. Les dimensions sont en pourcentages (sauf pour les degrés qui ne changent pas ), c'est à dire que si vous voulez des flotteurs de 80 cm, le redan doit faire 80x2/100 soit 1,6 cm. Il y a deux types, j'affectionne particulièrement le type 2 car il augmente le volume arrière flottant sans changer l'angle de dégagement. Dans les deux cas, le ski est parallèle à la surface supérieure.
Forme vue en coupe
Je vais séparer la suite en deux parties :
la forme supérieure, qui est l'enveloppe extérieure du flotteur,
la forme inférieure, qui est la partie patin de ce dernier.
La forme supérieure
Elle n'a que peu d'importance sur le flotteur lui même. C'est bien souvent un compromis entre esthétique et facilité de construction. Cela peut jouer aussi sur les qualités de vol. Je vais en décrire trois types avec leurs avantages et inconvénients.
Forme proposée |
Avantages |
Inconvénients | |
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Facilité de construction (il suffit d'un bloc de roofmat coupé au cutter). Idéal pour essayer car facilement modifiable. |
Moche, ça fait bricolage. Traînée en vol due à la grande surface plane. | |
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Excellent compromis. Facilité de construction en structure (tous les coffrages sont plats). Moins courants que les suivants et pas si laids. |
Quelque peu anguleux, ne s'accorde pas avec toutes les lignes d'avion. Moi, j'aime bien, alors je n'en trouve pas beaucoup, des inconvénients. | |
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Incontestablement le plus beau, il donne une ligne effilée au flotteur vu de dessus. Certainement une traînée plus réduite et moins d'effets parasites en vol. |
Peu original. Construction plus difficile. Peu de surface plane supérieure pour la fixation. |
La forme inférieure
Elle a pour sa part une plus grande influence sur les performances du flotteur. Elle forme la gerbe d'eau, maintient droit l'avion et peut éventuellement favoriser le déjaugeage. Il en existe plusieurs types avec chacun leurs adeptes.
Fond plat |
Fond en V |
Fond parabolique |
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Il a pour avantage d'être très facile à construire, et ce quelque soit le type de construction. Il fonctionne très bien pour les petits et moyens modèles. Pour ma part, la plupart de mes appareils sont équipés ainsi. Par contre, il a quelques inconvénients. Il est très peu tolérant sur un défaut d'alignement. L'appareil a tendance à déraper lors de la prise de vitesse. Il freine plus lors de l'amerrissage. Au moment où l'avion touche l'eau, il doit être bien parallèle à la surface et bien en ligne. |
Il est un peu plus difficile à construire, mais il reste le plus utilisé car tous les inconvénients du fond plat sont gommés. |
C'est un enfer à construire, mais c'est le top. Car en plus des avantages du fond en V, il a celui de former une belle gerbe d'eau sur les côtés, ce qui évite qu'elle ne remonte trop dans l'hélice. |
Le fond idéal étant celui ci-dessous, si vous avez du courage...
Pour finir (provisoirement...)
Voilà, vous avez tous les éléments en main pour réaliser votre première paire de flotteurs. L'étape suivante, que vous découvrirez dans le prochain numéro d'@éronews, vous expliquera comment installer vos flotteurs tout neufs sur votre machine.
A bientôt.
Article publié grâce à l'aimable autorisation de Joël Sabrié. Vous retrouverez de multiples informations sur les hydravions sur son site web à l'adresse : http://perso.wanadoo.fr/j.s/hydravions/